Salut Sandra, tu as connu comment l’Hygiène Naturelle Infantile ?
J’ai découvert la pratique avec mon aîné, il y a un peu plus de 7 ans. J’avais vu une amie pratiquer avec sa fille de 7 mois trois ans avant. Elle lui avait proposé via la parole, les signes et des onomatopées de faire pipi au-dessus d’un lavabo. Son bébé avait éliminé direct ses urines. J’avais été soufflée !
Comment as-tu commencé ?
Dès le retour de la maternité, en imitant mon amie et en suivant ses indications. Au moment des changes, je proposais presque systématiquement à mon nouveau-né d’éliminer au-dessus du lavabo. Je dis « presque » car je le faisais rarement quand nous avions des invités. Je n’assumais pas la démarche car j’avais encore du mal à y croire moi-même ! C’est tellement différent de ce qu’on entend au sujet des compétences des bébés !
Tu faisais comment ?
Je signais « pipi » ou « caca » et ajoutais une onomatopée « pssss ? » à mon invitation « tu veux faire pipi ? ». Ça fonctionnait à chaque fois. C’était dingue. J’étais super fière de cette capacité à nous comprendre. Cela décuplait la confiance en mes compétences de maman. Et on a aussi beaucoup ri des loupés !
Illustration : Lætitia Busseuil
Tu as fait ça longtemps ?
Ma maman est venue passer une semaine chez nous quand Louis avait 5 mois. Durant son séjour, j’ai arrêté la pratique de l’HNI par peur de la choquer. Quand j’ai voulu reprendre, Louis ne répondait plus à mes propositions.
J’ai tenu bon car je croyais sincèrement en les bénéfices relationnels et sanitaires de l’HNI. Je proposais à Louis d’éliminer au moment des changes. Il n’éliminait pas mais il y a probablement eu un impact de cette pratique car Louis a commencé à signer « pipi » et « caca » vers 14 mois juste avant d’éliminer. Dès ses 15 mois, à la maison, il éliminait aux toilettes et était sans couche.
Il a redemandé des couches pour éliminer dedans juste avant la naissance de son petit frère, mais ça a peu duré. Son pot n’a pratiquement jamais servi : je ne me souviens même pas l’avoir vu assis dessus !
Tu as le même vécu de l’HNI avec le petit frère de Louis ?
On a commencé la pratique de l’HNI quand Johann avait 1 mois, en lui proposant d’éliminer au moment des changes. Jusque-là, j’étais alitée et c’est son papa qui s’occupait des changes. Il n’avait pas envie d’ajouter une tache d’observation à ses activités de la journée.
Les croyances sociales ont la vie dure. Bien qu’on était convaincu des bénéfices de l’HNI en termes de communication et d’hygiène, et bien qu’on ait constaté son efficacité avec notre ainé, on avait encore du mal à y croire.
En m’observant pratiquer l’HNI avec Johann, mon compagnon a relevé qu’avant chaque élimination, Johann grimaçait, râlait ou se tortillait. Nous avons compris dès lors que notre enfant pouvait, de lui-même et instinctivement, nous signaler son besoin d’éliminer. Cela nous paraissait fou, mais on ne pouvait qu’y croire puisqu’on le constatait.
Johann a été complètement propre et sans couche à 21 mois, la veille de son entrée en maternelle.
Pour ta benjamine, tu as été plus loin dans la pratique, n’est-ce pas ? C’est l’époque où je t’ai connue d’ailleurs. Je t’ai vue proposer à ta petite de 5 mois d’éliminer alors que tu facilitais une célébration prénatale !
(rires) C’est exact ! Avec Séléna, j’ai eu envie de commencer dès sa naissance. 1h après sa naissance, je me souviens même avoir eu envie de refuser une couche pour elle. Le méconium et les urines étaient pour moi ni plus ni moins que des déchets du corps, et n’étaient pas du tout sales.
Dès les premiers jours de Séléna, je catchais des pipis et des cacas ! Les loupés (proposition sans réponse positive ou bien élimination non anticipée) survenaient quasiment qu’au moment des visites où j’étais moins connectée avec Séléna et davantage connectée aux besoins des invités.
Qu’est-ce qui a pu freiner votre pratique de l’HNI ?
À mon sens, ma plus grande erreur a été d’écouter les avis des gens, au lieu de me faire confiance et de faire confiance à mon enfant : « Vous avez bien autre chose à penser. Reposez-vous plutôt. Les parents attendent au moins un mois pour pratiquer l’HNI. C’est impossible qu’un bébé puisse exprimer son besoin d’éliminer. Il fait trop froid pour cela. Tu vas te stresser pour rien. Tu projettes sur ton bébé, ce n’est pas bon pour lui. C’est du viol de son intimité. »
Je restais aussi quelque peu en difficulté avec les modalités pratiques de l’HNI. C’était difficile pour moi de trouver comment concilier l’HNI avec ma réalité : trois enfants, des trajets matin midi et soir pour l’école, en plein hiver, des temps de transport en commun importants (école à 5 km), du mobilier pas protégé à la maison…
J’ai eu beaucoup de mal à trouver de l’information et du soutien. J’ai enfin trouvé une réunion HNI à laquelle assister quand Séléna avait 6 mois !
Heureusement que j’avais des expériences passées positives, une grande détermination et le soutien de mon compagnon !
Illustration : Lætitia Busseuil
Quel a été le rôle de ton compagnon d’ailleurs ?
Il constatait l’économie de machines et s’extasiait des pipis et cacas dans l’évier. Pour autant, il ne pratiquait pas. Un jour, alors que nous discutions dans la cuisine et que nous pensions Séléna endormie dans le salon, il s’est levé et a dit : « Attends, Séléna a envie de faire pipi ! ». Il lui a proposé d’uriner et c’est ce qu’elle a fait.
Depuis ce jour, il pratique régulièrement. Il s’est senti, je crois, compétent. Cela a changé la donne : je me suis sentie soutenue pour de bon.
Qu’en as-tu déduit ?
Cette expérience nous a montré que, de la même façon qu’une mère allaitant au sein peut savoir par avance que son enfant va avoir besoin de téter, les deux parents peuvent ressentir le besoin d’éliminer de leur enfant !
Cela a transformé quelque chose en nous. En nos compétences de parents. En notre corps et son pouvoir, son savoir intuitif. On s’est dit que nos corps captent des indices discrets que notre néocortex ne récupère pas, ne traite pas et n’interprète pas.
Et du coup, après trois expériences différentes de l’HNI, tu définis cette pratique comment ?
Pour moi, l’HNI est avant tout une forme de relation à l’autre et à soi. Une capacité à écouter notre intuition. C’est aussi une façon de reconnaitre à un enfant sa part d’autonomie et sa capacité à communiquer autrement que par la parole, de lui reconnaitre son droit à la propreté, Je le vois comme une voie de respect de sa personne.
Tu trouves que l’HNI est facile à pratiquer ?
J’ai mis du temps à faire passer l’HNI avant les considérations matérielles… oser laisser Séléna fesses nues partout à la maison sans peur de mouiller les matelas et de tacher le canapé…
Il m’a fallu aussi bien 3 mois pour oser proposer à Séléna d’éliminer dans la rue, dans le train, dans le bus, en formation et 3 mois de plus pour oser lui proposer face à des personnes connues. Cela a pourtant suscité des regards et des paroles enthousiastes.
Je te propose qu’on garde cela comme sujet principal de notre prochain échange sur l’HNI !
Parfait !!
Merci Sandra !
Louis à 16 mois. Monté seul sur les toilettes.
>>> Et vous ? Avez-vous eu du mal à oser pratiquer l’HNI ? Quels ont été vos freins ?